Fait Maison

C'était ainsi qu'il fabriquait par exemple, ses paniers. 
            On avait des plants d'osier dans le fond du jardin avec lesquels il tressait ses paniers. Il faisait aussi ses haveneaux, c'est-à-dire ses articles de pêche pour aller aux îles car c'était un grand marandier. Pour cela on allait dans la campagne. Il choisissait des branches, qu'il coupait, qu'il chauffait au feu pour arrondir et sur laquelle il fixait le filet. En quelque sorte les épuisettes de maintenant, enfin tout ça était fait à la main. De même ses crocs, comme il les appelait, c'est-à-dire ses crochets, ses gros hameçons qui servaient à attraper les congres et les homards. Pour cela il choisissait des branches de houx, le houx étant paraît-il un bois imputrescible sans doute et avec une certaine résistance. Tout ça c'était fait par lui-même, vous pouviez chercher dans les boutiques, il n'y en avait pas.
            Moi j'avais droit à une faveur spéciale, il faisait ses hottes très bien, avec la corde, à mettre sur l'épaule. Moi j'avais droit à un traitement spécial, j'avais ma petite hotte – elle a fini par porter les épingles pour étendre le linge dans le jardin, mais tous les enfants de la maison, Jean Garoche, votre cousin, tous ils en ont eu. C'était du chèvrefeuille qu'il faisait chauffer, enfin qu'il faisait bouillir un peu je pense, et qu'il épluchait patiemment. Il vous tressait avec cela cette chose bombée de la hotte. Il arrivait à entrelacer ces tiges de chèvrefeuille. Et vous faisait une de ces finesses de hotte ! Il y en a toujours eu dans la famille, je n'ai jamais vu une hotte ou un panier sortant d'un magasin. Tout ça demandait du temps, mais c'était les veillées, et des jours. Et puis après il avait plus de temps quand il a cessé de travailler pour l'entreprise.
             Le jour des grandes marées il allait "au bas de l'eau" pour pécher souvent il revenait avec un congre.
Un congre, aussi grand que "Zénobie «comme il se plaisait à dire.
Il avait "un trou" qui se trouvait près de la plage du Port-es-Leu qui n'existe plus, en bout des rochers sous une balise que l'on appelé :"La perche" elle marquait l'entrée du port coté Etables sur mer


           J'ai oublié de vous dire aussi, toutes les choses et les semences dans le jardin, c'était rare qu'il achetait des graines. Vous aviez, dans ce fameux bâtiment où on faisait le cidre, vous voyiez pendu aux poutres du plafond, ses haricots attachés en petits paquets, la tête en bas. Haricots qu'on battait d'ailleurs, une fois secs, pour récolter la graine et la semer l'année d'après.
Ils élevaient des lapins dans des cabanes dans le jardin, adossées à "La porte branle"
           Il passait des heures à leur préparer à manger en découpant avec "son couteau" des carottes et autres légumes en petit cubes ainsi que du pain .Il leur donnait aussi de la Luzerne qu'il cultivait dans une pièce de terrain près de son ancien Atelier rue de la Fontaine. Ces bâtiments existent toujours en 2015 et l’on peut y lire Garoche et fils en mosaïque.

           Il avait des petits casiers, qu'il fabriquait aussi. Il sélectionnait ses pommes de terre, parce qu'il avait toutes sortes de variétés de pommes de terre, et il les mettait bien patiemment l'une à côté de l'autre, prête à germer, de façon que l'époque venue, il n'avait plus qu'à porter son petit cageot dans le jardin pour les planter. 
          Tout cela c'était fait à la maison, même la graine de poireau et la graine d'oignon. Je les voyais dans le jardin ces grosses touffes, un poireau qui monte c'est rigolo, ça fait une grosse tête. Ça aussi il les laissait mûrir, puis il les battait pour récolter la graine et la gardait pour s'en servir comme semence. Encore que, je sais qu'au bout de quelques années, pour éviter qu'elles s'abâtardissent je suppose, il fallait croiser – il faut des croisements aussi chez les plantes. Il en achetait des semences, mais autrement il faisait tout lui-même, secondé par Maman.
         Parce que s’ils étaient partis de Saint-Alban, ils avaient gardé quand même l'atavisme de la terre. Ils étaient terriens. Le fond de leur âme était terrien. Mais, je vous répète encore, entre Saint-Alban et Saint-Quay-Portrieux il y avait une telle différence de vie           C'est pour ça que quand j'allais en vacances j'étais contente, parce que d'abord j'étais la petite délurée, je venais de la ville, tout le monde était en admiration devant moi, un phénomène. J'avais la langue bien pendue paraît-il, et moi les mœurs comme ça, ça m'étonnait. Et je ne me gênais pas pour le dire !

Les galants

        Par exemple quand Arthur avait fréquenté Titine – à ce moment-là c'était la mode, je m'en rappelle encore – il y avait ce qu'on appelait les galants qui venaient, mais il n'y avait pas qu'Arthur ! Ils étaient assis sur le banc, Titine d'un côté et vous aviez les amoureux, là sur le banc.
      Tout cela menait la conversation. Celui qui était près d'elle avait le droit de lui prendre la main, et tout cela se passait vraiment dans des banalités !
       Puis après quand ils étaient partis, Arthur me l'a souvent dit – c'est vrai que j'ai toujours eu pour mon cousin Arthur, le père de Marie-Ange, une petite faiblesse, je l'aimais bien il a toujours été très gentil avec moi ; il est le parrain de Françoise d'ailleurs – je disais toujours à ma cousine, en parlant de l'un ou l'autre, avec mon sans-gêne de petite fille de la ville qui avait l'habitude de dire ce qu'elle pense :
      – Tu ne prendras pas celui-là toujours, Titine ! En parlant des autres. Oh, il est moche celui-là.
Il y en a un que j'avais baptisé le grand nez.
          Mais ce qui est amusant et que je tiens à vous dire, c'est que dans ce temps-là – et cela a toujours été plus ou moins ainsi – c'est que ma tante Marie n'était pas toujours de mon avis. Elle, voyait la grosse ferme, le pognon, etc. Tandis qu'Arthur ce n'était pas ça...
          Je ne pense pas qu'elle ait influencé Titine à ce point-là. Qu'elle ait influencé ou pas pour le mariage de Titine et d'Arthur, de toute façon cela a été un très bon ménage, même s'ils n'ont pas eu toujours la chance, puisque la maladie est venue des années plus tard. Et Arthur a été un brave gendre pour elle.


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