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Mes Vacances

             Donc je venais en vacances au Poirier, à Saint-Alban. J'y allais passer quelques journées, mais jamais coucher quand même. J'allais manger chez mes tantes, mais enfin c'était le Poirier le centre de mes vacances. La vie y était plus typique qu'à Saint-Quay-Portrieux et je ne sais si à travers ces lignes vous pourrez juger de la différence qu'il pouvait y avoir, alors que seulement quarante kilomètres séparent la vie à Saint-Quay de celle à Saint-Alban.

             Les enfants de Mathurine Boulvard et Jacques Garoche, mes tantesVous pouvez voir encore ma « résidence secondaire » au Poirier avant le carrefour, devant chez Thérèse Jégou.(Jégu) (1937-2017)Elle tourne le dos à la route mais est toujours debout. D'ailleurs, un peu avant d'y arriver sur la gauche, existe encore la maison natale de Papa. Ce sont des maisons bretonnes typiques, assez bases, en pierre naturellement et couvertes d'ardoise. Pas des belles maisons blanches comme maintenant, d'ailleurs les ans y ont laissé leurs traces.
             La maison se composait de deux pièces principales. Il y en a encore une du même modèle au Vau-Belay, bien que les bâtiments étaient un peu plus grands. Avec la différence que les cousines cuisinent dans la pièce d'entrée, alors que nous ne vivions que dans une seule pièce ! Une autre, attenante, servant si l'on peut dire d'arrière-cuisine. La soue à cochons était au bout de cette pièce, à l'autre extrémité était l'étable. J'entendais, la nuit, les vaches qui remuaient les chaînes... Le té, comme on dit en patois – c'est-à-dire l'endroit où l'on vivait je pense – avait pour centre de vie si je puis dire, la grande cheminée, ouverte, où pendait la crémaillère avec le chaudron.
               Dans le conduit était accrochée une branche d'arbre, avec ses rameaux, bien noirs, bien culottés, où pendaient en guise de feuilles les saucisses et les andouilles du dernier cochon tué de l'année. Qu'elles étaient bonnes !... On n'en fait plus des comme ça. Le feu était toujours allumé. Feu de bois, naturellement. Vif, s'il fallait cuisiner bien sûr, ou rougeoyant sous les cendres. Je l'ai toujours connu allumé, toujours veillant sous la cendre, attendant le coup de soufflet pour repartir si besoin était. Et dans ces cendres toutes tièdes reposaient les marmites. Les cocottes en fotin, comme disait ma mère, traduisez en fonte. Bien culottées elles aussi, comme de vieilles pipes. Ici pas de cuisine rapide, fast-food et autres. On prenait le temps de laisser cuire, tout doucement, sans se presser.
             À côté aussi et Dieu sait que je m'en rappelle, il y avait ces grands pots en terre, genre de ce que vous prendriez maintenant pour y planter vos fleurs. C'était le pot, avec le lait, où mûrissaient les cailles de lait. Oh qu'elles étaient bonnes ces cailles ! Votre fromage blanc maintenant, à côté, n'est presque – si j'ose dire – que du plâtre ! Mais c'est peut-être le souvenir qui fait ça.
            Au mur pendait la galétière avec ses accessoires, le rouabe – c'est le petit râteau en bois pour étaler la pâte. Dans l'âtre plusieurs trépieds, sur le côté ou accrochés au mur, de différentes tailles en fonction des marmites. Pas question ici de fourneaux et autres cuisinières, alors qu'à Saint-Quay nous avions déjà la bonne cuisinière en fonte noire, avec ses barres et son bain-marie en cuivre bien brillant.
           Chez Jeanne-Marie il y avait déjà l'électricité. Je n'ai connu les lampes Pigeon et autres lampes à pétrole que comme décor, ou en cas de panne bien sûr. Il n'y avait comme lumière, en tout et pour tout, qu'une seule ampoule électrique qui pendait au milieu du plafond, avec un simple abat-jour de faïence blanche, que les chiures de mouches assombrissaient encore.
Au plafond pendait également le saindoux dans une vessie de porc – on cuisinait beaucoup au beurre et au saindoux – la graisse rouellée et la poitrine de porc pour la soupe – c'est de la poitrine de porc, roulée sur elle-même, ficelée, pendue au plafond.


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